Le corridor interocéanique de l’isthme de Tehuantepec : un pont économique entre deux océans

Claudia Sheinbaum

Le Corridor interocéanique de l’isthme de Tehuantepec (CIIT) est un projet stratégique mis en œuvre par le gouvernement mexicain dans le but de relier l’océan Pacifique et le golfe du Mexique (océan Atlantique) via la région la plus étroite du pays, l’isthme de Tehuantepec. Ce projet vise à transformer cette région du sud-est mexicain en un axe logistique, industriel et commercial d’envergure internationale.

Composantes du projet

Le CIIT repose sur plusieurs volets d’infrastructures majeures :

  • Modernisation du chemin de fer entre les ports de Salina Cruz (État de Oaxaca) sur la côte pacifique, et Coatzacoalcos (État de Veracruz) sur la côte atlantique.
  • Développement et modernisation des ports de Salina Cruz et Coatzacoalcos pour accueillir un volume accru de marchandises.
  • Création de routes, centres logistiques et zones industrielles, appelées polos de desarrollo, le long du corridor.
  • Mise en place de zones économiques spéciales, avec des incitations fiscales pour attirer les investissements nationaux et étrangers.
Isthmus of Tehuantepec

Objectifs du corridor

Le projet poursuit plusieurs objectifs clés :

  1. Proposer une alternative au canal de Panama pour le transit des marchandises entre l’Asie, l’Amérique et l’Europe.
  2. Stimuler le développement économique du sud-est du Mexique, région historiquement moins favorisée.
  3. Renforcer l’intégration du Mexique dans les chaînes de valeur mondiales, notamment en lien avec les États-Unis, principal partenaire commercial du pays.
  4. Attirer les investissements par le biais d’un environnement favorable à l’implantation d’industries (fiscalité allégée, logistique facilitée).

Enjeux stratégiques

Le CIIT positionne le Mexique comme un acteur géopolitique majeur dans le domaine de la logistique et du commerce maritime. Il vise à réduire les coûts et les délais de transport, tout en favorisant la délocalisation d’industries proches du marché nord-américain (nearshoring). Il représente aussi une opportunité de croissance pour les régions de Oaxaca et Veracruz.

Défis et critiques

Malgré ses ambitions, le projet soulève plusieurs inquiétudes :

  • Enjeux environnementaux : L’isthme de Tehuantepec est une région riche en biodiversité, et les travaux d’infrastructure pourraient affecter des écosystèmes sensibles.
  • Impacts sociaux : Les populations autochtones, nombreuses dans la région, expriment des craintes quant à la protection de leurs terres, cultures et modes de vie.
  • Sécurité : Certaines zones traversées par le corridor sont confrontées à des problèmes de violence et de criminalité organisée.
  • Acceptabilité locale : Le projet doit composer avec les résistances sociales et les demandes de participation communautaire.

Une première opération réussie

Le CIIT a franchi une étape majeure avec la réalisation de sa première opération de transport de marchandises. En effet, le 28 mars 2025, 900 véhicules Hyundai en provenance de Corée du Sud ont été déchargés au port de Salina Cruz. Ils ont ensuite été acheminés par voie ferroviaire jusqu’au port de Coatzacoalcos, marquant ainsi la première utilisation opérationnelle du corridor. Cette traversée a duré une semaine, contre une douzaine de jours en moyenne via le canal de Panama, démontrant l’efficacité et le potentiel du CIIT comme alternative logistique.​

Le CIIT offre une solution complémentaire au canal de Panama, particulièrement en période de congestion ou de sécheresse affectant ce dernier. Grâce à des infrastructures modernes et à une réduction significative du temps de transit, le corridor attire l’attention des acteurs économiques internationaux. La présidente mexicaine, Claudia Sheinbaum, a souligné que ce projet permettra aux pays asiatiques de diminuer leurs coûts logistiques et stimulera l’économie régionale.​

Le projet prévoit la création de dix pôles industriels le long de l’isthme, visant à générer des emplois et à attirer des investissements dans une région historiquement moins développée. Le gouverneur de l’État d’Oaxaca, Salomón Jara, voit dans le CIIT un « nouveau modèle économique » pour le Mexique, renforçant sa position dans le commerce intercontinental.​

Philippe
Philippe